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Nichée au cœur de l’Alaska, une ville extraordinaire défie l’imagination. Whittier, petite localité de seulement 200 âmes, se distingue par son organisation unique : la majorité de ses habitants vivent et travaillent dans un seul et même bâtiment. Cette curiosité architecturale et sociale fascine les visiteurs du monde entier, offrant un aperçu saisissant de la vie communautaire dans des conditions extrêmes.
Un concept architectural hors du commun
Au cœur de Whittier se dresse Begich Towers, un imposant édifice de 14 étages qui domine le paysage. Construit en 1957, cet ancien baraquement militaire abrite aujourd’hui la majorité des habitants de la ville. Ses 150 appartements de deux à trois chambres constituent le cœur battant de cette communauté unique.
L’intérieur du bâtiment rappelle étrangement les couloirs d’un lycée, avec ses murs en blocs de béton peints en jaune pâle et ses panneaux d’affichage. Cette atmosphère particulière crée un sentiment de proximité entre les résidents, renforçant les liens communautaires.
Voici quelques-unes des caractéristiques remarquables de Begich Towers :
- Un bureau de poste à l’entrée
- Un poste de police au rez-de-chaussée
- Une laverie automatique
- Un petit marché et une épicerie
- Une clinique pour les soins mineurs
- Un bed and breakfast sur les deux derniers étages
- Une église au sous-sol
Cette concentration de services essentiels sous un même toit permet aux habitants de Whittier de vivre confortablement malgré les conditions climatiques difficiles qui caractérisent la région.
Une vie communautaire façonnée par l’environnement
La configuration unique de Whittier s’explique en grande partie par son climat rigoureux. Située sur la côte ouest du Prince William Sound, la ville est soumise à des conditions météorologiques extrêmes, notamment en hiver. Des vents violents pouvant atteindre 100 km/h et des températures glaciales sont monnaie courante.
Le tableau ci-dessous illustre les températures moyennes à Whittier :
| Période | Température moyenne |
|---|---|
| Année | 5,1°C |
| Juillet (mois le plus chaud) | 14°C |
| Janvier | -2,1°C |
| Record de froid (décembre 1942) | -34°C |
Face à ces conditions extrêmes, la centralisation des activités et des logements dans un seul bâtiment apparaît comme une solution pragmatique. Elle permet aux résidents de vaquer à leurs occupations quotidiennes sans avoir à affronter les éléments. Une école, reliée à Begich Towers par un tunnel souterrain, complète cet écosystème urbain autonome.
Malgré son apparente singularité, la vie à Whittier est décrite comme normale par ses habitants. Erika Thompson, une enseignante résidant dans la tour, témoigne : « Pour moi, c’est simplement chez moi. Pour la plupart, on connaît tout le monde. C’est une communauté sous un seul toit. Nous avons tout ce dont nous avons besoin. »
Une histoire militaire et un avenir touristique
L’histoire de Whittier est intimement liée à son passé militaire. Begich Towers, initialement appelé Hodge Building, faisait partie d’un projet ambitieux de l’armée américaine. Conçu pour abriter le quartier général du Corps des ingénieurs de l’armée des États-Unis, il devait être accompagné de dix autres structures similaires. Néanmoins, seuls deux bâtiments furent finalement construits.
Le second édifice, le Buckner Building, achevé en 1953, était surnommé la « ville sous un toit ». Malheureusement, il fut abandonné et demeure aujourd’hui une relique silencieuse du passé militaire de Whittier. À leur apogée, ces deux bâtiments étaient les plus imposants de tout l’Alaska.
Aujourd’hui, Whittier se tourne vers l’avenir en misant sur le tourisme. La beauté naturelle environnante, l’abondance de la faune et l’aspect insolite de la ville attirent de nombreux visiteurs. Photographes, randonneurs et pêcheurs sportifs y trouvent un terrain de jeu unique. Le port en eaux profondes accueille également des navires de croisière, faisant de Whittier une escale prisée pour les voyageurs en route vers Vancouver.
L’accessibilité de Whittier reste mais un défi. On ne peut y accéder que par la mer ou en empruntant le tunnel Anton Anderson Memorial, un ouvrage à usage mixte route/rail qui ne fonctionne que dans un sens à la fois et ferme complètement la nuit. Cette relative isolation contribue à préserver l’authenticité et le charme particulier de cette cité hors du commun.
Un modèle urbain unique en son genre
Whittier représente un cas d’étude intéressant en matière d’urbanisme et de vie communautaire. Sa configuration atypique soulève des questions sur l’adaptation des sociétés humaines à des environnements hostiles et sur les formes que peut prendre la vie urbaine dans des conditions extrêmes.
Les avantages de ce modèle sont nombreux :
- Efficacité énergétique accrue grâce à la centralisation des logements et des services
- Renforcement des liens sociaux au sein de la communauté
- Résilience face aux conditions climatiques difficiles
- Optimisation de l’utilisation de l’espace dans un environnement géographiquement contraint
Pourtant, ce mode de vie soulève également des interrogations sur la privacy et l’autonomie individuelle dans un contexte de promiscuité permanente. Il illustre néanmoins la capacité d’adaptation remarquable de l’être humain et la force des liens communautaires dans des situations hors du commun.
Whittier demeure ainsi un exemple unique d’innovation urbaine, né de la nécessité de s’adapter à un environnement exigeant. Cette ville-bâtiment, véritable microcosme social, continue de fasciner et d’inspirer, offrant peut-être des pistes de réflexion pour l’urbanisme du futur face aux défis environnementaux croissants.
