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Journée noire de l’Éducation /
Profs et parents toujours mobilisés contre les inégalités
Avec le passage de la loi Blanquer au Sénat cette semaine, le collectif parents-profs en lutte à Saint-Denis a voulu monter la mobilisation d’un cran en impliquant davantage les parents. Pour ce faire, six grandes réunions de quartier ont été organisées mardi 14 mai. « Le but est d’informer, car les textes sont compliqués et des amendements sont sans cesse rajoutés », explique Louise, enseignante à Opaline déléguée CGT.
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Une école à deux vitesses
À la réunion de la Maison de quartier de la Plaine, une quarantaine de parents et d’enseignants, venant d’une quinzaine d’établissements, se sont rassemblés. Stéphanie, déléguée du personnel Snuipp-FSU, enseignante à Le Cordouan, explique plusieurs points de la loi Blanquer. « L’obligation de scolarisation à 3 ans va imposer aux mairies de financer les écoles maternelles privées, des fonds publics en moins pour les autres établissements », alerte-t-elle. Ce qui risque d’accroître des inégalités territoriales déjà présentes.
« L’établissement le moins bien doté de Paris l’est plus que l’établissement le plus doté de Saint-Denis. Le département subit une forte pression démographique, mais des postes d’enseignants continuent d’être supprimés », rappelle Jimmy, enseignant délégué SNES au lycée Angela-Davis. Dans certains établissements, comme au collège Fabien, le manque de moyens a poussé à l’arrêt de certains clubs ou dispositifs. « L’aide aux devoirs des enseignants a été suspendue », rapporte une prof. Camille, déléguée Sud éducation et enseignante à l’école maternelle Bas-Prés, attend toujours, elle, d’avoir une Atsem pour sa classe.
Autre point d’inquiétude concernant tous les niveaux de l’éducation : le recours aux contractuels. « La moitié des profs de maths sont contractuels dans le secondaire de l’académie de Créteil. Il y a de grandes difficultés de recrutement d’enseignants dans le département, ce qui mène à l’embauche de ces contractuels, titulaires d’un master mais sans aucune formation pédagogique. Le projet de loi de la transformation de la fonction publique va pérenniser cette pratique », avertit Jimmy.
Une mobilisation en demi-teinte
Recours à des étudiants dès leur 2e année de licence pour certaines missions, bac territorialisé, choix restreints de spécialités au lycée, non-dédoublement des classes de CP et CE1… Les sources d’inquiétudes sont nombreuses pour les parents, qui craignent que le lieu de vie de leurs enfants ait un impact important sur leur avenir. Ce jeudi 16 mai, plusieurs d’entre eux se sont mobilisés pour montrer, de manière symbolique ou incisive, leur « refus de ces lois discriminantes », comme l’affirme Nina, mère d’élève à l’école Calmette. « Une quarantaine de parents étaient présents à Calmette-Pasteur, nous avons fait sortir dans la cour les enfants et appelé l’inspecteur. » Cette perturbation n’a duré qu’une partie de la matinée.
À l’école La Montjoie, le blocage aura tenu symboliquement une quinzaine de minutes. « Nous ne pouvons pas mettre en difficulté les parents, mais nous avons pu échanger avec eux sur les conséquences des réformes et certains d’entre eux ont décidé d’emmener leur enfant au travail », explique Honorine, mère d’élève. Dans cette école maternelle et à l’école élémentaire voisine Saint-Just, le taux d’absentéisme a été de 24%. Si l’on est loin du « jeudi noir » espéré par le collectif parents-profs, la mobilisation a tout de même commencé à toucher d’autres familles.
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Les intrusions qui ont eu lieu récemment dans certaines écoles ont donné une impulsion à la mobilisation du quartier Delaunay-Belleville-Langevin-Péri-Sémard. Plus de 200 personnes étaient présentes à la réunion du mardi soir. Le jeudi, les cours ont été annulés dans les écoles du groupe scolaire Victor-Hugo-Balzac-L’Hermitage et au collège Fabien. Une manifestation d’une centaine de personnes a déambulé toute la matinée dans le quartier pour affirmer « l’école est à nous ». « Les parents sont surtout mobilisés pour réagir à l’intrusion, la loi Blanquer cela leur paraît encore peu concret », confie une enseignante de Balzac. Ce cortège familial a pourtant rejoint le rassemblement de 11h30 devant l’hôtel de ville, en criant le slogan « Dans tous les quartiers, dans toutes les régions, un même droit à l’éducation ». Une convergence qui peut être résumée avec cet autre slogan scandé : « On veut des moyens, on n’est pas des moins que rien ».
Le manque de personnel encadrant étant l’une des grandes revendications. Environ 300 personnes étaient présentes à ce rendez-vous qui mettait aussi en avant l’insuffisance de moyens dans l’ensemble des services publics.
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Les lycées étaient aussi mobilisés, avec un taux d’absence de 80% pour les élèves de 2nde à Angela-Davis par exemple. « Nous ne voulons pas les appeler à bloquer, car ils prennent des risques énormes face aux forces de l’ordre », précise Jimmy. Avec d’autres parents d’élèves, la maire adjointe Suzanna De la Fuente, en charge de l’enseignement primaire, a proposé à la réunion de quartier de la Plaine de « préparer un courrier type que chaque famille enverra au président de la République ».
Interpellée par une mère d’élève sur « le rôle de la mairie », elle précise qu’il est surtout question « d’accompagnement du mouvement, avec notamment la mise à disposition d’un car pour que les familles puissent se rendre à la manifestation nationale de samedi 18 mai, à Paris ».
Delphine Dauvergne
Réactions
claude (Pseudonyme non vérifié)
21 mai 2019
Thomas (Pseudonyme non vérifié)
21 mai 2019
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