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Archéologie
/ La fin d’un Cygne

Le chantier de fouilles programmées dans cet îlot en cœur de ville entamé en 2009 par l’Unité d’archéologie est achevé. Riche en découvertes, il est encore ouvert au public du 12 septembre jusqu’en octobre. Il pourrait être aussi le théâtre d’une autre ambition...
Les fouilles archéologiques de la rue du Cygne se sont achevées définitivement cet été.
Les fouilles archéologiques de la rue du Cygne se sont achevées définitivement cet été.

C’est la fin d’un cycle au 4 rue du Cygne. Depuis 2009, l’Unité d’archéologie de la Ville de Saint-Denis y menait une fouille programmée d’envergure. Les recherches, qui s’achevaient définitivement cet été, ont permis de mettre au jour entre autres découvertes les berges du Croult, un puits collectif, des fosses de tannage, des meules ou encore un abreuvoir, retraçant ainsi un pan conséquent de l’histoire dionysienne, du Xe siècle jusqu’à l’ère industrielle.

L’équipe d’archéologues menée par Michaël Wyss a étudié d’importantes surfaces en sous-sol et a pu conserver deux bâtiments à étages à l’ombre de l’échafaudage installé à l’entrée du site qui permettait de contempler les bermes de cet îlot urbain. Dans son état actuel, le chantier dévoile des éléments illustrant les sept grandes phases de l’évolution de la ville : la rivière artificielle du Croult aménagée par les moines de l’abbaye au début du IXe siècle, le fossé du castellum commandité par Charles le Chauve pour protéger l’abbaye des invasions vikings, un canal de déviation en rapport selon toute vraisemblance avec la construction d’un moulin à eau, les fondations des premières habitations du bourg monastique établies sur le fossé asséché, la reconstruction du quartier à la fin du XIIIe siècle avec de nouvelles maisons bâties autour du puits collectif, les fosses des tanneries qui ont investi cet îlot entre le XVe et le XVIe siècle et, enfin, des cuves de lavoirs et de blanchisseries qui correspondent à l’arrivée au XVIIIe siècle de nouveaux entrepreneurs aux abords du Croult dont le cours s’assècha en 1957. 

Mais pourquoi s’arrêter ? « Dans cet îlot du Cygne, nous avons cherché à comprendre la fabrication de la ville à partir des remparts d’un bourg, le castellum, explique Nicole Rodrigues, la responsable en chef de l’Unité d’archéologie. Nous avons fait un important travail de fouilles mais il faut pouvoir le raconter à présent. Il faut traiter le matériel, confronter les données, dater les niveaux… Scientifiquement, nous avons compris l’évolution du site. L’objectif de départ est donc atteint. De plus, on ne peut creuser indéfiniment au cœur d’un îlot urbain. »

Mais que les passionnés d’archéologie se rassurent. Si les fouilles s’arrêtent, l’équipe de chercheurs, elle, se tourne déjà vers l’avenir et les solutions de conservation de ce terrain et sa mise en valeur. « Nous allons bien sûr devoir remblayer une partie pour la protéger. Aussi nous souhaiterions entrer en résonance avec un autre chantier. Celui du remontage de la flèche de la basilique. Il faut rendre le chantier vivant et didactique », confie Nicole Rodrigues qui précise sa pensée : « La Crypta Balbi à Rome est notre modèle depuis le début. » Véritable musée d’archéologie urbaine, ce site en possède la plus importante collection au monde. Il est aussi scindé en deux parties. La première présente les résultats des fouilles lancées au début des années 1980 jusqu’à aujourd’hui. La seconde décrit l’évolution de la ville entre le Ve et le Xe siècle. Un modèle qui plaît tout particulièrement à l’Unité d’archéologie, récompensée du Prix européen du patrimoine archéologique lors du congrès de l’European Association of Archeologists en Lituanie l’an passé. 

Le chantier de la Fabrique de la Ville sera débâché le 12 septembre pour les Journées européennes du Patrimoine, et restera ouvert jusqu’en octobre pour la Fête de Saint-Denis.

Maxime Longuet