Portrait

Aménis Khaldi-Legriel
/ Carrée de la tête aux épaules

Rugbywoman. Initiée au rugby par une association, cette Dionysienne pur jus évolue depuis trois saisons en première division féminine avec Bobigny. Rigoureuse sur le terrain, elle l’est aussi en dehors pour mener de front sa pratique du haut niveau, le rugby universitaire et ses études.
Aménis Khaldi-Legriel, rugbywoman. © Adrien Verrechia
Aménis Khaldi-Legriel, rugbywoman. © Adrien Verrechia

Aménis Khaldi-Legriel porte haut les couleurs de l’AC Bobigny, mais elle est dionysienne depuis toujours. La jeune femme de 21 ans vit en centre-ville dans les bâtiments au-dessus de Carrefour. C’est à Saint-Denis que ses parents se sont rencontrés. Si elle est née d’un père d’origine marocaine, sa mère vient de Montauban, presque un signe annonciateur de sa future passion. Pourtant, ce n’est pas à travers ses racines qu’elle s’est découvert une passion pour le sport roi du Tarn-et-Garonne.

« La première fois que j’ai fait du rugby, c’était au collège Fabien. C’était un sport comme un autre du cycle scolaire. On faisait un tournoi interclasses. C’était une première approche, j’avais bien aimé, mais pas jusqu’à m’inscrire en club », raconte Aménis.

Cref et bac mention très bien

Le déclic a lieu à Drancy, où elle effectue ses deux dernières années de collège. Sa professeure d’EPS la juge trop brusque lors d’un cours de handball et lui suggère le rugby : « Elle m’a conseillé une association qu’elle connaissait, Drop de Béton. C’est une asso qui essaie d’inclure par le rugby les femmes mais aussi les personnes handicapées de quartiers populaires. » La voilà embarquée à 14 ans pour un entraînement avec des filles d’Aulnay-sous-Bois. Aménis se souvient : « Elles étaient plus grandes que moi et avaient plus l’habitude de faire du rugby. J’ai commencé à y aller une fois par semaine. J’ai accroché. J’ai participé à des tournois féminins inter-départements, avec l’équipe du 93. C’est là où l’on a commencé à me parler de compétition. »

La rugbywoman en herbe est repérée notamment par Jonathan Marquet, l’actuel entraîneur du Sdus et surtout cadre technique au sein de la Ligue Île-de-France. Elle intègre dans la foulée de sa première année de rugby le CREF (Centre régional d’entraînement et de formation) situé au lycée Jean-Pierre-Timbaud de Brétigny.

« Suite à cela, il me fallait vraiment un club inscrit en compétition, explique la trois-quarts centre. C’est à ce moment que je me suis inscrite à Bobigny à ma première année cadette, quand j’avais 15 ans. Au CREF, on était à l’internat du lundi au vendredi. Le vendredi on rentrait dans nos clubs s’entraîner et jouer le week-end. » Un rythme soutenu qui ne l’empêche pas de décrocher une mention très bien au bac ES. : « Je suis assez exigeante avec moi-même. J’aimais déjà être la meilleure à l’école. C’était difficile. En internat, on avait tout le temps nos amies avec nous, on avait parfois envie de se reposer, de rire… J’ai gardé ça en essayant d’être aussi la meilleure au rugby », confie-t-elle. La meilleure, elle l’a souvent été avec Bobigny où elle est sacrée championne d’Île-de-France de rugby à VII dès sa première année cadette, avant d’être vice-championne de France la saison suivante en tant que capitaine, puis de se lancer à XV la dernière année.

Ascension express

Sous sa chevelure bouclée se devine une silhouette carrée. Sans doute parce qu’elle évolue en Élite 1, la première division féminine, depuis ses 18 ans. Aménis Khaldi-Legriel s’en étonne encore : « Le coach avait changé quand je suis arrivée en seniors. Il me connaissait bien depuis les sélections 93. Il y a eu beaucoup de départs et ça a libéré des places. En six mois, on est passé de “jouer avec les cadettes” à “affronter des joueuses de l’équipe de France qu’on voit à la télé”. » En parallèle de ses premières années au haut niveau, elle a mené et obtenu à l’université Paris 8 une licence infocom en juin 2019. Désormais, Aménis s’attaque à un master communication des entreprises et des institutions publiques à Villetaneuse. Des études qu’elle arrive à concilier, grâce à son côté très organisé, avec ses trois entraînements hebdomadaires, auxquels s’ajoute parfois un autre de rugby universitaire. Une qualité qui se retrouve dans son jeu :

« Le rugby n’est pas une science exacte mais j’essaye de le rendre comme ça. C’est hyper important pour moi de tout comprendre, de tout savoir sur le plan de jeu. » Et l’équipe de France ? La centre de Bobigny « ne pense pas être à ce niveau-là » et ne prétend pas vivre de sa passion. En ce moment, elle travaille en stage à l’association Alice-Milliat, une fondation pour la médiatisation du sport féminin. Comme sur le terrain, peut-être a-t-elle trouvé un intervalle où s’engouffrer.

Adrien Verrecchia