À la une En ville
Des lecteurs témoignent/
« Le JSD, c’est le journal des habitants »
Malika Chemmah, parent d’élève FCPE lycée Paul-Éluard, habitante centre-ville
Cher JSD, mon essentiel journal, C’est avec le cœur gros que je t’écris ces quelques mots. Lorsque j’ai appris la décision de la nouvelle municipalité de supprimer la subvention qui te permet de fonctionner et de nous informer gratuitement, j’ai cru à un canular. Quand tu es né, j’avais 18 ans et j’habitais déjà la ville. C’est dire ô combien je me suis habituée à toi, je t’ai vu grandir et t’améliorer au fil des années. Membre du Réseau Éducation Sans Frontière et représentante des parents d’élèves de longue date, j’ai eu l’occasion de rencontrer plusieurs de tes journalistes sur des questions liées à mon engagement et j’ai pu apprécier leur travail journalistique de qualité et leur réactivité légendaire.
Tu as su progressivement t’adapter aux nouveaux formats de transmission de l’information, ce qui est assez rare pour un journal local. Tu fais partie du paysage de notre ville et ne plus feuilleter tes pages sur ma table du salon, serait comme ne plus entendre les cloches de notre basilique retentir. Quels que soient les maux qui te rongent en ton sein et qui ont pu motiver la municipalité dans sa décision, tu méritais mieux… Témoin de presque trois décennies de l’histoire de notre ville, tu méritais qu’on te sauve, tu méritais qu’on consulte tes membres et nous, tes lecteurs/ lectrices… Tu ne méritais pas cette fin. J’ose encore croire que tout cela n’est qu’un mauvais songe et que tu pourras souffler tes 30 bougies. Pour finir, merci à ces femmes et hommes qui te composent pour nous avoir fait connaître notre ville sous toutes ses facettes et dans ses moindres recoins.
Nina Boumellah, parent d’élèves, Floréal-Saussaie-Courtille
C’est avec un beaucoup de chagrin que j’apprends la fin du Journal de Saint-Denis. Il fait partie de notre histoire. Certes, la municipalité veut arrêter le JSD de nos boîtes aux lettres mais elle ne pourra jamais effacer ce journal de nos mémoires. C’est grâce à notre JSD que nous avons pu nous rapprocher. Le JSD a donné la parole à tous les Dionysiens, connus ou inconnus, grands ou petits. Il a permis de libérer la parole des habitants. Le journal a accompagné tous les parents d’élèves dans leurs combats. Mère de famille, je suis très reconnaissante au JSD. Plus généralement, le journal a permis aux Dionysiens et Dionysiennes de suivre l’actualité qu’elle soit heureuse ou malheureuse. Aujourd’hui, la municipalité a décidé d’enterrer la parole libre et mettre fin à la liberté d’expression. Merci à vous chers journalistes. Vous étiez et vous restez pour nous une fierté.
Linda Maziz, habitante, parent d'élèves, ex-journaliste du JSD
La dernière fois que j’ai écrit à la rédaction du JSD, ça date, c’était pour y postuler. Je n’étais pas familière de la ville. Même tout le contraire, je venais d’emménager à Saint-Denis. J’étais une nouvelle voisine heureuse de me sentir Dionysienne en devenir. Dès sa première visite dans ma boîte aux lettres, le JSD m’a permis de découvrir Saint-Denis dans son intimité, dans sa réalité. Toutes ces petites et grandes choses qui font le tourbillon de la vie, ici comme nulle part ailleurs. Le JSD faisait intrinsèquement partie de cette dynamique et pour moi il en est même devenu la matrice. Monomaniaque du journalisme de terrain, de contacts, de proximité, j’ai envoyé une candidature spontanée, dosée en motivation comme jamais. Une vraie lettre d’amour. Mon JSD, je t’aime, veux-tu m’embaucher ? Ouf, il a dit oui. Toi et moi, toi et nous, on a vécu des trucs de fous, que je n’oublierai jamais. À base de solidarités, de luttes, de drames, d’injustices, de rires, d’espoirs... C’était tellement intense et passionnel que lorsque je t’ai quitté, ça ne pouvait être que pour changer de métier. Ce faisant j’ai aussi retrouvé le plaisir de te lire chaque semaine. Quelle chance c’était et comme c’est dur de réaliser que c’est terminé. Je suis très triste et dégoûtée pour les collègues qui n’ont pas démérité. Force et courage l’équipe. Et merci pour tout. J’espère que ça vous console tous ces témoignages qui débordent de cet ultime journal. Vous allez manquer. Tellement manquer.
Luca Poissonnet, cofondateur de Saint-Denis Ville au Cœur, association organisateur de la Marche des fiertés
Quand je suis arrivé à Saint-Denis il y a bientôt six ans, la première chose que j’ai faite a été d’ouvrir le JSD pour décider quoi faire de ma journée et ne pas rester enfermé dans mon logement étudiant du Crous. Je suis triste d’entendre que le JSD s’arrête.
Chantal Delahousse, militante associative, habitante de la Mutualité
J’ai du mal à comprendre le choix du maire Mathieu Hanotin. Il aurait fallu réfléchir à d’autres formes du JSD, par exemple un JSD par quartier, avec un concept de rédaction avec des habitants. Mais il ne fallait pas arrêter le JSD. Je suis profondément choquée parce que ce titre ne m’est jamais apparu comme étant un journal de propagande. Loin s’en faut. Pendant les élections, il y avait des choses qui me dérangeaient. Mais c’était journalistique. C’est sans doute une décision économique : Mathieu Hanotin veut peut-être faire autre chose avec la subvention du Journal de Saint-Denis. Il faut bien trouver l’argent pour la police municipale…
Le JSD permettait la confrontation des idées
C’est normal qu’une nouvelle municipalité veuille opérer des changements, mais là, c’est trop radical. Pour en parler beaucoup autour de moi, des gens qui ne sont pas encartés ou politisés, le JSD, c’était leur point d’accroche avec la ville. En arrêtant le journal, on va encore plus éloigner les gens de la vie municipale. Le maire voudra faire sa propre publication. Mais sous quelle forme, on n’en sait rien. C’est dommage parce que dans la communication, il faut de la confrontation. Et le JSD le permettait. Différents points de vue y étaient exprimés. Au café associatif à Floréal, on parlait souvent de ce qui était écrit dans le journal. On n’était pas toujours d’accord. Mais on était dans un esprit de construction. Avant le JSD, il y avait Saint-Denis Républicain. Et c’était un titre orienté. Et pourtant, cela allait dans le sens de mon appartenance politique communiste. Le JSD, c’était le contre-exemple.
Ahmed Jamaleddine, association Amal, grande mosquée Imam Malik
C’est avec surprise et désolation que j’ai appris l’arrêt prochain du JSD. Un journal riche en événements, associant les habitants de la ville en leur donnant la parole, relatant la vraie vie de la cité à l’image de ses citoyens de différentes communautés. Ce qui nous prouve que le vivre ensemble, l’amitié et la fraternité existent bien dans notre pays.
Je voudrais tout particulièrement remercier Aziz Oguz pour son accompagnement et son suivi à travers plusieurs articles tout au long de la construction de la grande mosquée Imam Malik à Saint-Denis, ainsi que toute l’équipe du JSD. En effet, le JSD nous a permis d’informer les Dionysiens depuis la pose de la première pierre (juin 2006), du début des travaux (2009) jusqu’à l’ouverture officielle de la grande mosquée (mai 2019). Bon courage à vous et merci de nous avoir fait voyager durant toutes ces années.
Jean-Pierre Aurières, professeur d’histoire-géographie au lycée Paul-Éluard
Il est dommage que le JSD s’arrête. Une voix originale de Saint-Denis s’éteint. Depuis 2006, le Journal de Saint-Denis a suivi les voyages que j’ai organisés chaque année avec des classes de Paul-Éluard. Le JSD, c’était le compagnon de route de nos voyages. Pour les gamins, et leurs parents, c’était un objet de fierté d’être dans le journal de leur ville. Je me souviens qu’en 2011, on a fait un numéro spécial dans le JSD, avec un encart de quatre pages, que les élèves qui étaient partis en Guatemala avaient réalisé. Ils l’avaient fait dans les locaux du journal. C’était un travail pratique in situ avec les journalistes de la rédaction. Les gamins avaient pu faire le chemin de fer, choisir les articles, les photos, etc. C’était vraiment superbe.
Le journal était quand même lu par les jeunes. Au CDI du lycée, je voyais des élèves le lire ou au moins le feuilleter. Moi, je n’habite pas Saint-Denis. Je lisais le JSD au lycée. Je le trouvais aussi à la librairie Folies d’encres. Cela me permettait de me maintenir informé de ce qui se passait dans la ville. C’était un journal d’utilité publique. En mettant fin au journal, une partie du patrimoine de Saint-Denis disparaît.
Diangou Traoré, cofondatrice de Franc-Moisin citoyenne
Nous regrettons la disparition du Journal de Saint-Denis. Le JSD, c’est une équipe humaniste près de la population qui retranscrit les réalités de Saint-Denis. Nous gardons en souvenir nos événements couverts par le JSD, notamment les brigades vertes et les opérations « ma cité propre» à Franc-Moisin par Aziz Oguz. Un journaliste tout terrain. Lors d’une opération de nettoyage, il est resté toute la journée avec nous pour participer à cette action citoyenne. Il est venu à tant d’autres mobilisations dans le quartier. Le JSD a mis en lumière des débats sur la société actuelle, comme les violences policières, la démocratie citoyenne, etc. Cela participait à changer les mentalités.
Les membres du collectif d’habitants de Franc-Moisin
On est très peiné d’avoir appris la disparation du Journal de Saint-Denis. Le JSD nous a suivis dans nos actions. Au printemps dernier, le Journal a relayé le post sur le décès du boucher Saïd du supermarché G20 de Franc-Moisin, mort à cause du Covid-19, qui avait ému les habitants du quartier. Le JSD a partagé la cagnotte en ligne qui a ainsi pris énormément d’ampleur. Cet argent a soulagé la famille. Le journal a toujours répondu à nos sollicitations. Et on ne pense pas que le futur magazine qui sera mis en place par la mairie en fera autant. On en doute fortement.
« La fin du JSD, c’est la fin de nous »
Quand les personnes se sont mobilisées contre la démolition de leurs immeubles concernant le projet de l’Agence national de renouvellement urbain (Anru), le JSD a répondu aux sollicitations des habitants. Il leur a donné la parole. C’était très important pour nous de savoir que lors de nos mobilisations et de nos luttes qu’il y avait toujours un petit article dans le journal. Le JSD a mis de la lumière sur nos démarches. Quand le jeune Amine a subi une arrestation très musclée par la police en septembre dernier, le JSD était présent. Il n’a jamais manqué aux appels. Le journal a été d’une aide incroyable. Il n’y a que du positif. La mairie a mis fin à ce journal. Mettre fin à ce journal, c’est mettre fin aussi à la parole des habitants. Quand demain il y aura une lutte on sait qu’il n’y aura plus personne pour la relayer. C’est terminé. Celui qui voudra s’exprimer n’aura malheureusement plus que les réseaux sociaux. La disparation du JSD va plus nous isoler qu’autre chose. Les gens ne sauront même plus ce qui se passe avec l’Anru à Franc-Moisin. On n’aura plus des nouvelles des autres quartiers. En fait, la fin du JSD, c’est la fin de nous.
Collectif Bien vivre à Saint-Denis 93, Quartier Delaunay-Belleville-Sémard
Avec la fin imminente du JSD, nous perdons collectivement une source essentielle et précise d’informations sur ce qui se prépare dans et pour notre ville, ainsi qu’un moyen de réagir à ces informations par des tribunes publiées dans ses mêmes colonnes. Citons quelques sujets traités par le JSD, parfois repris au national, et qui ont touché le quartier Delaunay-Belleville-Sémard ces dernières années :les livraisons non assurées dans nos quartiers dits “sensibles” Zones sensibles » ; le trafic aux proportions industrielles à la cité Dourdin Delaunay-Belleville ; la mobilisation des habitants formant des chaînes humaines autour des écoles. Et plus récemment : le projet, remis en cause par la nouvelle municipalité, d’une MPAA construite à la place de l’ancien commissariat de la police nationale ; le devenir du bâtiment de La Chaufferie ; l’annonce du maintien du bâtiment du commissariat pour y installer finalement la police municipale.
Qui portera désormais la diversité des voix de la ville ? Qui révélera les informations qui fâchent parfois la mairie ? Nous remercions l’équipe de ce journal unique qui a rythmé 35 ans de nos vies dionysiennes et leur adressons nos pensées solidaires.
Cécile Gintrac, membre du comité de vigilance JO 2024 à Saint-Denis, habitante du centre-ville
La disparition du JSD est une grosse perte dans la ville en pleine transformation qu’est Saint-Denis. Ce journal, c’était la garantie d’avoir des journalistes qui suivent les dossiers et pas seulement les « gros dossiers ». Je n’ai pas toujours été en accord avec la manière – très enthousiaste – de présenter les projets olympiques mais je reconnais que le comité de vigilance JO a toujours pu donner son point de vue et interpeller si besoin.
« Préparer les JO sans contrepoint citoyen »
La fin du JSD, cela signifie que les habitant-es n’auront plus une vision nuancée de ce que va devenir leur ville en dehors de la communication officielle. Impossible d’imaginer que cela n’a pas joué dans la décision brutale de couper les subventions. Mathieu Hanotin s’assure peut-être ainsi de préparer les JO sans contrepoint citoyen.
Marie Huiban, Droit au logement (DAL) de Saint-Denis
La lutte de l’association DAL des victimes du 48 rue de la République, après l’assaut anti-terroriste du 18 novembre 2015, a été longue pour obtenir enfin la régularisation, le relogement et la reconnaissance des droits pour les habitant-e-s. Il a fallu, pendant des années multiplier les manifestations, les actions, les rassemblements, devant l’immeuble, la mairie, la sous-Préfecture, les ministères divers et variés…
Les habitant-e-s ont dû, jour après jour, mois après mois, années après années, montrer à nouveau leur détermination, les voisin-ne-s, à nouveau leur solidarité, les associations, à nouveau leur soutien, et chaque victoire a été arrachée. Je crois que Linda Maziz a couvert pour le JSD toutes ces manifestations et, dans ce qui nous est tou-te-s apparu comme une incroyable et dégueulasse indifférence et injustice, c’était important ! C’était important qu’il y ait un journal, distribué à l’ensemble des dyonisien-ne-s, qui relate les vies, les galères, les luttes et les victoires des dyonisien-ne-s, dans lequel les collectifs d’habitant-e-s, les associations pouvaient aussi s’exprimer, tirer des sonnettes d’alarme, appeler au soutien.
Et aujourd’hui, il y en a tellement besoin : Il faudrait encore parler de celles et ceux qui vivent à la rue ou dans des taudis et qui crèvent de l’inaction des pouvoirs publics quand des immeubles de bureaux sont vides à côté. Il faudrait encore parler des locataires qui n’arrivent plus à joindre les deux bouts, qui sont de plus en plus à devoir choisir entre remplir le frigo ou payer le loyer, qui vont être de plus en plus nombreux menacés d’expulsion. Il faudrait encore parler des prix des loyers qui explosent, des HLM qu'on démolit et des gens qu'on chasse à coup d'opération d'urbanisme. Il faudrait relayer les appels à manifester contre les expulsions de logement le 27 mars, à s’organiser quartier par quartier pour se soutenir et s’opposer à ces expulsions. Et de tous les autres sujets qui touchent, révoltent ou mobilisent les dyonisien-ne-s.
David Chhean, cofondateur de l’association des anciens du lycée Suger
J’ai commencé à lire le JSD quand je suis rentré au Sdus tennis de table vers la fin du collège, début du lycée. Je le lisais à La Raquette. Je suivais les résultats du club, qui était déjà en Pro à l’époque. C’était mon journal de référence pour suivre l’actualité du club. À partir de ce moment, je ne l’ai jamais lâché. Je regardais l’actualité du sport, des clubs de football en particulier. Je lisais aussi les rubriques des offres d’emploi et des petites annonces. C’était drôle de voir ces petites choses. C’était vachement sympa. Cela montrait qu’il y avait une vie dans ce journal. Plus qu’unir les gens, le JSD, c’était un point d’ancrage. Tout le monde ne lisait pas le Journal de Saint-Denis, mais on savait qu’il était là. On le recevait tous dans la boîte aux lettres. Quand je voyais le JSD, je me disais « ah qu’est-ce qui se passe dans ma ville ? ».
« Fier d'être dans le JSD »
Je suis dionysien à la base. J’étais très fier d’apparaître dans le journal de ma ville quand le JSD a mis en avant l’association des Anciens du lycée Suger. C’était la première fois que je me voyais dans un journal. On a pu faire avancer la cause de notre association grâce notamment à l’exposition du Journal de Saint-Denis. Cela nous a ouvert des portes auprès des acteurs dionysiens. Nous devons préserver l’héritage du Journal de Saint-Denis. J’espère qu’à l’avenir il continuera d’avoir un journal local que l’on appelle le JSD ou pas. En tout cas, il faut un journal qui appartienne à ses habitants.
C’est dommage la fin du JSD dans le sens où on n’aura plus d’informations locales sur la ville. Le journal créait du lien entre la population et la mairie. Les gens pouvaient s’exprimer leur point de vue sur les réseaux sociaux du JSD, sur la page du journal, même ceux qui n’étaient pas d’accord avec la municipalité. Ils pouvaient y exprimer des affinités politiques. Tout ça, c’est fini. D’après ce qu’il a dit, il veut créer un nouveau journal. Mais cette nouvelle publication sera à l’avantage du maire. Mathieu Hanotin éditera ce qu’il voudra. Il fera sa propre communication. Il décidera des thématiques. Lui et son cabinet décideront de tout. Comme dans les autres villes, ce sera une espèce de prospectus où on mettra en avant les actions de la Ville. Ce ne sera pas un journal. Les difficultés sur la ville, on n’en parlera plus.
Le JSD, c’est Saint-Denis. Tout le monde a grandi avec le journal. Petit à Franc-Moisin, je me rappelle quand on l’avait dans la boîte aux lettres. Le JSD avait un bon relais dans les quartiers. Cela n’existera plus à l’avenir. Aujourd’hui, personne ne s’occupe des quartiers, même lors du mandat précèdent, alors qu’il y a des problèmes. Le journal avait plus d’affinité politique avec les communistes. Pour le maire, le JSD, c’était un ennemi à balayer. Mais tu ne peux pas balayer cette histoire du jour au lendemain.
Julien Villain, étudiant entrepreneur dionysien, cité Péri
C’est un coup de tonnerre. La situation au JSD était compliquée, mais cela ne justifiait pas de mettre fin au JSD. On parle d’un titre emblématique qui fait partie de l’histoire de la ville. Ce choix pris unilatéralement pose question. Il a été décidé pour tous les Dionysiens de supprimer leur journal. On parle de l’argent des Dionysiens. Les habitants auraient dû avoir leur mot à dire […]. Ce journal est un titre de presse à part dans le paysage. Il permettait de mettre en avant toute la vie locale, les bons et les mauvais côtés, alors que la Seine-Saint-Denis est généralement pointée du doigt dans les autres médias.
Le JSD permettait justement de montrer la complexité du territoire. Il mettait en lumière une vie de quartier, associative et citoyenne. Il montrait qu’il y avait une vie normale à Saint-Denis. Dans les portraits, on voyait toute une diversité de profils: cela cassait les caricatures sur les banlieusards. Cela faisait du bien. C’est quelque chose que l’on va perdre. Et qu’on ne retrouvera peut-être jamais. […]. Alors que nous sommes en période de confinement, il est d’autant plus regrettable d’enlever un des points d’accroche que les habitants, et notamment les anciens, ont avec la vie de la cité.
Samba Sacko, cofondateur de l’association Igo
Le JSD fait partie de ma vie depuis ma plus tendre enfance. Grâce à lui, j’étais plus ou moins informé de l’actualité de la ville. Depuis 2016, j’ai vu un changement sur la politique de ce journal que j’ai trouvé plus ouvert. Avant, on parlait peu de ce qui se passait au sein des quartiers populaires. On parlait peu des souffrances de certains secteurs, on ne valorisait pas autant les jeunes.
« Vous étiez les messagers de nos quotidiens »
Depuis 2016, le JSD a su redonner un nouveau souffle car depuis cette période j’ai vu les journalistes circuler librement dans les quartiers. Parfois même, on faisait appel à vous. Vous faisiez partie de nos vies, vous étiez les messagers de nos quotidiens, vos articles étaient justes.
Je suis vraiment dégoûté qu’on puisse effacer ainsi ce journal. Je ne doute pas qu’on nous mettra un autre journal sous une autre forme. Mais apprendre que ce journal ne va plus exister c’est apprendre qu’une partie de notre ville sera à l’arrêt. Même si je ne connaissais pas tous les journalistes du JSD, je trouvais leurs approches très belles, très à l’écoute des sujets… des sujets positifs ou négatifs. Ils ont trouvé leur façon de transmettre. Merci, merci, merci. On perd un journal mais on gagne des Dionysiens qualifiés, oui, car il y a des Dionysiens parmi ces journalistes avec qui j’ai eu la chance d’échanger : Aziz, Yslande, vraiment de belles personnes, je vous écris le cœur lourd mais sachez une chose soyez fier vous serez toujours les bienvenus dans nos quartiers populaires.
Mathieu Richard, fondateur de Joliot sans frontières
Je suis abasourdi. Je pensais que malgré la coupure de la subvention, le JSD aurait pu continuer. Le JSD, c’est un journal essentiel. Pour les habitants de la ville, c’est une institution. Aujourd’hui, j’ai la trentaine. Je suis né et j’ai grandi avec le JSD. Plus jeune, c’est le seul journal que je lisais, que ce soit pour les résultats sportifs, les événements culturels, etc. Cela a mis en lumière les actions de nous les jeunes. La reconnaissance dans le journal, cela nous touchait. C’était une source de fierté, de motivation à continuer de se mobiliser dans la ville. Franchement, je suis vraiment touché par l’arrêt de ce journal emblématique.
Idrissa Diabira, 33 ans, né et grandi à Saint-Denis, fondateur de Urban Jeunesse Academy
Le JSD, un journal qui va beaucoup nous manquer, dynamique, humaniste, toujours à la page! Il y a de nombreuses années, le JSD a couvert mon départ en Angleterre, un tournant dans ma carrière. Et puis, au fil des années, tous les événements liés à l’asso, tournoi pour Luigi, les distributions alimentaires… Nous retiendrons: « petit journal local avec un grand cœur ».
Ligue des droits de l’Homme, section St-Denis Plaine Commune
La section LDH de Saint-Denis Plaine Commune apprend avec tristesse la fin du Journal de Saint-Denis. Elle salue l’engagement des journalistes et la diversité des opinions et des informations qui étaient publiées. Elle remercie ce journal pour les annonces de ses débats avec les partenaires locaux ou lors des congrès de la LDH à Saint-Denis, et pour les articles témoignant de son intérêt pour les enjeux et les problématiques d’atteintes aux droits de l’homme.
Grâce au Journal de Saint-Denis, les citoyen.nes ont pu connaître l’observatoire de la fraternité en Seine-Saint-Denis, l’observatoire des pratiques policières en Seine-Saint-Denis, le plaidoyer pour la création de nouveaux bains-douches, les actions pour des villes accueillantes envers les Roms ou les réfugiés, les débats des quinzaines antiracistes, les débats pour un monde en paix ou les permanences d’orientation juridique.
Un journal local pluraliste, engagé pour les droits, un tel journal qui ferme, c’est une blessure et une perte pour la démocratie locale ! Une telle perte interroge sur les motifs et sur les modalités des aides publiques à la presse, possibles pour la presse nationale mais plus délicates pour la presse locale. La section espère que les journalistes retrouveront du travail et espère retrouver un journal local d’une telle qualité dans les prochains mois.
François Longérinas, journaliste
Le JSD, un média local emblématique. Le Journal de Saint-Denis est dans le paysage médiatique actuel un média atypique et exceptionnel. Nous savons toutes et tous que toutes les mairies publient un journal municipal, qui a de fait pour unique objet de communiquer à la population de la commune des contenus éditoriaux émanant des instances municipales. C’est donc avant tout un outil de comm’ qui délivre des messages et non des informations à part entière. La mission des journalistes professionnels est de délivrer des informations, qui ont été vérifiées et qui intègrent potentiellement des contradictions et des points de vue différents émanant des acteurs concernés.J’ai d’ailleurs entendu maintes fois des Dionysien·ne·s considérer le JSD comme une «Pravda» locale et autant me dire qu’ils ne supportaient pas que certains reportages remettaient en cause la mairie en place jusqu’en juin2020. C’était en fait de bons symptômes de l’indépendance éditoriale de la rédaction.
« Liquider le JSD est un acte grave de déni de la démocratie »
Étant à la fois journaliste de profession, formateur de journalistes et lecteur assidu du JSD depuis que je suis habitant de notre ville, j’ai pu constater que le travail était réalisé dans un cadre éthique et déontologique dans le respect de la charte des journalistes. Comme dans tout média, il y a eu des bévues, des erreurs, mais secondaires par rapport au travail effectué.
Qu’il y ait eu des désaccords au sein de la rédaction est coutumier dans tous les journaux. Dans ce cas, il s’agit de trouver, comme dans tout fonctionnement collectif, les solutions de résolution des conflits et des désaccords. Certes, cela se traduit parfois par des départs de journalistes. C’est classique et c’est pourquoi a été créée dans le droit du travail la «clause de cession», qui permet aux démissionnaires de bénéficier des mêmes droits que les salariés licenciés (indemnités…), lorsque le média a été racheté ou qu’il est prouvé que la ligne éditoriale a été fondamentalement réorientée. Profiter, comme le fait la nouvelle municipalité, d’une crise interne à la rédaction, pour liquider le JSD est un acte grave de déni de la démocratie. Voilà un acte qui remet en cause la liberté d’expression et d’information, à l’image d’une grande partie du paysage médiatique et du gouvernement actuel. Un journal local comme le JSD est un bien commun. Le liquider est un acte liberticide.
Jean-Jacques Clément, retraité de la RATP, habitant de la Plaine
Vingt ans que tu nous accompagnes ma famille et moi. Il y a 21 ans, en te parcourant, nous sommes tombés sur une annonce immobilière. Oui à cette époque, il y avait cette rubrique. Et cette annonce nous a permis de trouver notre maison à la Plaine. […] L’association mémoire Vivante de la Plaine y trouvait sa place. Pour couvrir son actualité ou nourrir un focus sur un bout d’histoire. Des brèves aux articles plus fouillés nous aimions le trouver dans notre boîte aux lettres.
« Pourquoi cette fin si brutale ? »
Cette aventure va prendre fin, la succession des équipes a vu le journal évoluer avec ces dernières années la version numérique. Des journalistes de terrain qui allaient à la rencontre de leurs sujets, de leurs interlocuteurs.Une spéciale dédicace pour les derniers articles que je garde dans ma boîte à archives. Mon portrait « Plainard d’un jour et pour toujours », les douches «Urgence sanitaire retour des bains douches » et les articles traitant des campements et de leurs réalités, de l’engagement des bénévoles du collectif «Solidarité Migrants Wilson». « Refoulés de Paris les réfugiés montent leurs tentes avenue Wilson » et « Quel système d’accueil pour les réfugiés en France ».
Avec ce dernier numéro, la question que beaucoup se posent : pourquoi cette fin? Pourquoi comme ça en plein mois de décembre? Les explications des uns et des autres n’ont répondu que très partiellement à cette question. Et maintenant qu’existera-t-il pour faire une place à l’actualité de nos quotidiens, pour mettre en valeur des hommes et des femmes qui apportent à leurs concitoyens? Pourquoi cette fin si brutale ?
Gisèle Lefèbvre, habitante de Jacques-Duclos
Le JSD c’est ce journal que je trouve dans ma boîte à lettres toutes les semaines, qui se lit très vite et qui me raconte ce qui se passe dans la ville où j’habite depuis une trentaine d’années. J’ai toujours été surprise de voir que ce journal pouvait passer de la boîte à lettres à la corbeille à papier, avec certains locataires.
Je commence par livres les « brèves », puis parfois l’édito qui se trouve en première page et ensuite je découvre un-e dionysien-ne ou un-e voisin-e proche que je connaîtrais un peu mieux avec « le portrait de la semaine ». Et la rubrique « @vous » qui est malheureusement trop courte sur la version papier et dont il faut lire la suite en allant sur le site … (ce qui n’est pas ma tasse de thé). Et puis bien sûr tous les autres articles plus approfondis sur des événements, des actions qui se sont passés au cours de la semaine dans notre ville. Et puis aussi, susciter le débat sur des sujets de société qui divisent : j’ai le souvenir d’avoir participé au premier « live » du journal, en novembre 2018, qui portait sur « la légalisation du cannabis » ; sujet qui me tient toujours à cœur car c’est le seul moyen pour sortir du chaos dans lequel nous sommes en France.
« M. Hanotin était pressé de faire la peau du JSD ! »
Moi qui suis plutôt de la « génération papier », j’ai appris, depuis quelques années, à découvrir le site en faisant des contributions pour la rubrique « @vous », et aussi en donnant mon avis sur des articles en tâtonnant dans les méandres du numérique. Alors que je maitrisais enfin cet outil, le nouveau Maire de St Denis arrive … et patatras ! il annonce un soir de décembre, et plus précisément au cours du Conseil Municipal du jeudi 17, qu’il supprime la subvention du journal et signe l’arrêt de mort du JSD en quelques minutes. Auparavant, il avait informé la Direction du Journal qu’il supprimerait une partie de la subvention en leur demandant un de préparer un projet moins onéreux. Il n’a même pas attendu de voir ce projet presque finalisé… M. Hanotin était vraiment pressé de faire la peau du JSD !
Il est vrai, parait-il, « que les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent »… Savoir que cette subvention va participer, en autres, au financement de l’armement des policiers municipaux me rend triste et me fait peur car la formation est loin d’être au Top même pour les policiers nationaux qui est passée de 12 mois à 8 mois. Ajouter de la violence à la violence ne sert à rien. Donnons plutôt des moyens à l’éducation.J’espère que les Journalistes pourront rebondir très vite pour continuer à exercer leur talent et qu’ils trouveront bien un moyen de dire aux fidèles lectrices et lecteurs ce qu’ils deviennent.
Mams, acteur associatif
Pour le meilleur pour certains, pour le pire pour d’autres, un chapitre se clôt.
Le JSD a été la possibilité de ne pas être prisonnier de la communication politique.
Il a été la voix des sans-voix, un des espaces où ils étaient valorisés.
Des informations qui s'adressaient à tous et étaient lues par beaucoup, à l'inverse d'un classique journal municipal.
Le supprimer est une décision à double tranchant. Certes, cela permet de se débarrasser d'un journalisme trop indépendant du pouvoir politique local.
Cependant, n'ayant plus d'espace d'information "neutre", un des grands gagnants sera les réseaux sociaux. Pour le meilleur et le pire.
« Supprimer le JSD est un choix périlleux »
Pour le meilleur et le pire, chacun son camp et sa bulle de filtre.
Un vide est créé. La nature en ayant horreur, par le meilleur et le pire, il sera comblé.
A l'heure de la bataille contre les fake news, supprimer le JSD est un choix périlleux.
Dans une société où la parole des élus vaut de moins en moins compte-tenu de leur exercice du pouvoir, de la verticalité des institutions et de la défiance des citoyens qui en découle, c'est un choix audacieux.
Dans une ville qui illustre particulièrement l'effondrement de la légitimité issue d'élections, où l’abstention est régulièrement reine, c'est un choix osé.
Pour la démocratie et les faits qui ne sauraient être réduits qu'à des points de vue, c'est un choix risqué.
Pour le meilleur pour certains, pour le pire pour d'autres, le JSD et sa singularité disparaissent.
Définitivement ou temporairement, c'est aux dionysiens que la décision reviendra...
Larhra Magassa, réalisateur, habitant de Joliot-Curie
Le JSD, c’est un journal qui nous accompagne depuis toujours. Plus jeune quand je lisais le journal, j’allais directement aux pages cultures pour voir l’actualité du moment, lire les portraits… J’apprenais à connaitre des Dionysiens. Il permettait de valoriser les habitants de tous les quartiers, de parler des petits aux gros projets culturels.
« Le JSD était comme le café du matin »
Le JSD me permettait de me sentir proche de ma ville et de ses personnes qui contribuent à faire de Saint-Denis une ville unique. Quand le Journal de Saint-Denis a fait mon portrait, c’était un immense honneur. Je figurais parmi les habitants qui comptaient. J’avais l’impression de laisser mon empreinte.
Le JSD m’a toujours paru comme un objet du quotidien. Il était comme le café du matin. En lisant le journal, en papier ou sur Internet, on savait ce qui se passait durant la semaine à Saint-Denis. Pour moi, qui s’intéresse beaucoup à la culture, aux sports, à l’éducation, à la citoyenneté, cela me permettait d’être au courant de comment la ville bougeait. Je regrette la fin du journal. Mais le JSD restera à jamais en nous : il fait partie du patrimoine de la ville de Saint-Denis. J’espère qu’un jour le Journal de Saint-Denis va se relever plus fort.
Denis Cittanova, professeur retraité d’histoire-géographie, habitant du centre-ville
Le JSD un certain reflet du bouillonnement social. Depuis 1990, date de mon installation à Saint-Denis pour travailler avec ma compagne dans l’Éducation nationale, j’ai toujours apprécié la part importante que consacrait le JSD à la relation des nombreux mouvements sociaux qu’a connus la ville ou le pays, mouvements auxquels j’ai participé ou que j’ai soutenus : des grandes grèves de 1995, du mouvement de la Seine-Saint-Denis qui en 1998 a vu pendant 2 mois enseignants, élèves, parents d’élèves engagés au coude à coude dans une grève victorieuse jusqu’aux mouvements plus récents contre la loi travail, sur les retraites pour la défense du service public des hôpitaux et plus récemment des communaux.
« Le porte-voix des habitants »
Le JSD se faisait aussi l’écho de problèmes plus locaux : les mobilisations sur les problèmes du logement, contre une usine comme la Saria qui rendait l’air irrespirable, les soutiens aux sans-papiers, la sécurité des usagers sur la voie publique… On pourrait faire un inventaire à la Prévert. J’ai toujours milité en tant que communiste révolutionnaire pour un retour aux origines des municipalités communistes dont le rôle dans les villes ouvrières était d’organiser et d’appuyer les mobilisations de ses habitants contre un État au service d’une minorité de grands capitalistes. On était très loin de tout ça avec la précédente municipalité. Pour moi, le journal local devant être d’abord leur porte-voix et non pas une feuille de chou insipide au service de l’ascension d’un petit politicien comme semble l’envisager notre nouveau maire. Le JSD actuel disparaît, mais je suis persuadé que comme le phénix il renaîtra de ses cendres et sera plus rougeoyant !
Agnès Renaud, professeure de français à Paul-Éluard, habitante quartier Gabriel-Péri
Comme beaucoup de Dionysiens, tous les mercredis, je guettais le JSD dans ma boîte aux lettres et m’agaçais quand je ne le trouvais pas. D’abord parce que j’ai toujours apprécié de connaître ce qui se passait dans ma ville, les billets sur le TGP qui me donnaient envie d’aller voir une pièce, les articles sur les associations ou sur les événements dans mon lycée (le lycée l’ENNA ou maintenant le lycée Paul-Éluard), les articles sur les habitants et leurs passions et surtout, parce que je suis militante de Lutte Ouvrière, les articles sur les luttes sociales dans notre ville. Du temps où nous avions des conseillers municipaux élus, j’étais contente de voir nos interventions dans le journal et je râlais quand elles étaient tronquées.
De la même manière, j’ai apprécié que le JSD rende compte de notre fête annuelle et fasse un article sur la venue de Nathalie Arthaud ou sur nos meetings même si nos idées étaient parfois malmenées. En un mot, comme de nombreux habitants, je regrette la fin de ce journal, qui n’était pas parfait mais n’avait rien à voir avec un bulletin municipal où seule la pensée majoritaire voire unique a la parole.
Christine Parra, professeure retraitée de français, habitante à quartier Gabriel-Péri
Mathieu Hanotin et sa majorité sont-ils dignes des Dionysiens qu’ils prétendent représenter lorsqu’ils suppriment le journal qui avait su instaurer une longue relation avec les habitants, d’accord ou pas avec les articles et les informations ? Un journal qui pensait à tous : version papier, numérique, courrier des lecteurs, distribué sur tout le territoire de la ville. Créé il y a 35 ans, il nous a accompagné-e-s, il nous attendait à l’hôpital, dans les écoles, à l’entrée des centres de santé, dans les installations sportives… Dans tous les services publics.
« Lire le JSD, c’était une promenade dans Saint-Denis »
Ce journal local indépendant a su crée un lien affectif à travers lequel s’est réalisée une identification à la ville. Il parlait de nous, nous y retrouvions notre univers, nos préoccupations. Le JSD était le miroir de notre ville qu’on aime ou pas cette dernière. C’est pourquoi il a été aussi une aventure humaine qui a uni les journalistes et le lectorat. Lire le JSD c’était une promenade dans Saint-Denis, des rencontres heureuse ou malheureuses, reflet de la vie de notre ville.
Un journal frêle et fragile mais debout chaque semaine jusqu’à sa suppression politique. Dernière une, dernière ligne, dernier mot, dernier JSD par la volonté d’une majorité municipale qui craint les aventures humaines. Nous, Dionysiens, saurons-nous rallumer l’espoir contre cette majorité municipale qui casse, détruit, ôte, supprime ? L’imposture ? Monsieur Hanotin, fut de faire croire que vous étiez un homme de gauche.
Simon Duteil, enseignant au collège Elsa-Triolet, habitant du centre-ville
Dionysien depuis un peu plus de douze ans, le JSD a été important dans ma vie et ma ville à plusieurs titres. En tant qu’enseignant d’histoire-géographie, ça a été la possibilité de travailler avec nos élèves sur la presse locale, sur la construction d’articles, sur la différence entre information et communication. Nous avons pu participer deux fois au journal des collégiens qui a certainement marqué celles et ceux ayant pu y participer. En tant que syndicaliste et militant, le JSD était un outil qui permettait de rendre compte de la vie locale foisonnante, des mobilisations dionysiennes, en particulier pour la défense des services publics, qui sont structurantes dans un territoire et pour une population qui subit de fortes inégalités et discriminations. La décision de la mairie est à ce titre très grave : c’est la destruction d’un outil qui donnait la parole à la population, aux oppositions, aux luttes, au pluralisme. Un journal qui participait à faire vivre la démocratie locale, une sorte d’exception culturelle là où les municipalités ne financent que des « journaux » lisses à la gloire de leur action et de leur maire. Il est à craindre aujourd’hui que nous allions dans le même sens à Saint-Denis...
Pierre Flament, Le Mouvement de la Paix
Je suis sans doute naïf, mais je ne pensais pas que le JSD disparaitrait du jour au lendemain sans explication aux lecteurs, aux citoyens de Saint-Denis. La personne de la médiathèque à qui je demandais ledit journal jeudi 7 janvier, et qui me l'a annoncé, pensait que la cessation du journal avait été indiquée aux lecteurs dans le dernier numéro de 2020. Or, le dernier numéro (N° 1270) n'en dit rien. Même si sa rédaction l'avait voulu, c’eut été impossible puisque le numéro 1270 est paru le mercredi 16 décembre matin et que le conseil municipal qui a sucré la subvention s'est tenu le 17.
« C’était un journal de gauche »
C'est une imposture. Les lecteurs et citoyens ne pas sont considérés comme respectables. Il est évident que l'annonce de la suppression de la subvention est ignorée de la quasi totalité des habitants de Saint-Denis. Sans doute, maintenant, des personnes vont s'étonner de ne pas recevoir leur journal comme habitude dans leurs boîtes aux lettres, sans en connaître la raison.
Alors que fait-on ? Certains militants de gauche trouvaient que le JSD n'était pas assez clair, ou si je traduis, ne disait pas assez de bien de la majorité municipale, voire de leur parti. Personnellement, j'ai toujours aimé le JSD. Il n'était pas neutre. C’était un journal de gauche. La pluralité qu'il incarnait me disait quelque chose du vivre en semble, de la culture de la Paix à laquelle je suis très attaché en qualité d'acteur du pacifisme avec l'outil “Le Mouvement de la Paix”. Avec le JSD, le mouvement social avait un allié pour faire connaître ses initiatives. Qu’en sera-t-il maintenant ? Pour faire le monde, pour faire la paix, il faut entendre et “comprendre les raisons de l'autre” (propos reçus de militants de l'Afrique du Sud du temps de Mandela par des pacifistes israéliens et palestiniens en recherche de solutions pacifistes).
Voici ce qu'en disait Marianne le 19 décembre : “Le JSD, dont la rédaction compte une dizaine de personnes, est décrit par plusieurs de ses membres comme un “ovni dans la presse locale”. Hebdomadaire d'information consacré à l'actualité de la ville de Saint-Denis, fondé en 1992 et distribué gratuitement à près de 50 000 exemplaires, il n'est pas un journal municipal mais est édité par une association. Son modèle de financement repose aux trois quarts sur les subventions de la ville. D'où un statut hybride, entre “autonomie éditoriale”, sans aucune relecture politique, mais dépendance de fait aux ressources de la mairie. Le précédent rédacteur en chef, Dominique Sanchez, avait d'ailleurs quitté son poste pour devenir assistant parlementaire de Stéphane Peu, député communiste local.”
J'ai récemment collecté en vue de la toute prochaine entrée en vigueur du Traité d'Interdiction des Armes Nucléaires le 22 janvier 2021 (le saviez-vous ?) l'ensemble des coordonnées des journaux. La posture du JSD est une exception: la quasi totalité des 40 villes (de droite, du centre, du PS, du PCF) possède un journal à la botte du maire. Alors oui, il dit du bien et joue la brosse à reluire du maire. Les citoyens qui peuvent trouver ça bien sont uniquement ceux qui ont voté pour cette majorité. Mais, la démocratie, elle est bafouée, excusez du peu.
Pourtant le grand risque encouru, toujours dans Marianne du 19 décembre : ““Très perplexe pour la suite”, Véronique Le Coustumer, maquettiste et doyenne de la rédaction, craint une reprise en main de la direction du JSD par la mairie de Saint-Denis, passée au Parti socialiste en juin.”
Voici les déclarations de Mathieu Hanotin lors de la campagne concernant le JSD : “Je trouve que le JSD est un outil assez unique qui permet de faire du lien au sein de la communauté. Nous avons besoin de journalistes locaux pour raconter ce qui se passe et faire vivre la démocratie […] La question du coût doit nous interroger […] Enfin, le JSD doit donner plus de garanties sur son indépendance politique. Il y a trop de doutes sur sa partialité. Je ne voudrais pas qu’on me fasse les mêmes reproches qu’au maire actuel. Et si l’association Communiquer à Saint-Denis refuse d’évoluer vers plus de transparence, nous pourrions nous réinterroger la subvention.” Nous sommes de toute évidence devant des dysfonctionnements grave avec la démission de deux journalistes… Hanotin et la nouvelle majorité municipale doivent agir dans l'urgence.
Donc : ne faut-il pas agir, réagir ? Produire un texte, une pétition ? Quant à s’engager sur un journal alternatif à celui de la mairie, bonne idée, mais il faut d’abord unifier la pensée collective et il y a du boulot. Encore aujourd’hui, les ruptures de la campagne des municipales ne sont pas aplanies.
Patricia Scarpa, secrétaire générale FSU à la Ville de Saint-Denis
Le syndicat SNUTER-FSU n’est malheureusement pas étonné de la décision de Mathieu Hanotin de ne pas renouveler la subvention attribuée par la ville au journal local de Saint-Denis créé depuis 36 ans. En effet, depuis l’installation de cette nouvelle municipalité en juillet dernier, nous assistons à une volonté politique de faire table rase de l’histoire de cette ville et d’en finir avec le dialogue social.
« La politique antidémocratique de M. Hanotin »
Le JSD a durant toutes ces années partagé dans ses pages l’actualité locale et l’histoire de Saint-Denis avec toutes ses luttes ouvrières pour plus de justice sociale, sa population multiculturelle qui a contribué à une telle richesse de diversités et de solidarités. A travers sa politique d’austérité et antidémocratique, M. Hanotin veut tourner une page de l’histoire de Saint-Denis en voulant faire disparaitre tout ce qui a un lien avec le passé…
Daniel Nail, secrétaire générale Unsa ville de Saint-Denis
Le JSD, pour les Dionysiens et le personnel municipal, c’est un journal historique. Je travaille à Saint-Denis depuis 37 ans. Je suis né à Saint-Denis. Et j’ai grandi à la Plaine. On est habitué à recevoir le JSD dans nos boites aux lettres.
Les gens y sont attachés. Il est regrettable que la nouvelle équipe municipale veuille faire table rase de 35 ans d’histoire. C’est leur choix. Et on ne peut que le condamner.
La majorité socialiste peut évidemment avoir ses idées, mais aujourd’hui, elle détruit toute notre histoire : Saint-Denis n’est plus Saint-Denis. On a l’impression que nos valeurs, tout ce qui fait notre ville, sont entrain de partir.
« Le JSD fait partie de l’histoire de Saint-Denis »
Le journal, c’est une information proche des citoyens. Il fait lien entre les habitants. Nous, en tant que syndicats, on ne pouvait pas toujours exprimer nos revendications. Les mouvements nationaux, comme sur les retraites, il y avait une large expression. Mais sur les luttes locales, liés à la municipalité, c’était plus compliqué, comme sur les grandes luttes au service propreté, plus récemment à l’état civil ou à la petite enfance. On sentait qu’il y avait moins de liberté. Mais les gens disposaient d’un moyen d’expression. Le journal était engagé auprès des personnels en lutte. Les salariés de la ville lisaient le journal.
Maintenant, il ne nous restera plus que des journaux comme le Parisien ou l’Humanité, de moins en moins présent. Il n’y a plus de relais sur le territoire. Néanmoins, le JSD fait partie de l’histoire de Saint-Denis. On ne nous l’enlèvera pas. Aujourd’hui, une hégémonie se met en place. Nous, on continuera à lutter.
Sdus 93 Tennis de table
On mesure la limite d’Internet et des réseaux sociaux quand chacun attend avec impatience le résumé de la soirée à La Raquette, quand la charge émotionnelle du match nous a fait traverser tous les sentiments. Le Journal de Saint-Denis nous a permis de prolonger ces émotions. Nous exprimons tous nos remerciements à ceux qui ont participé, depuis de nombreuses années, journalistes, photographes et salariés à la rédaction de la page sport du JSD !
Saint-Denis Emotion, club d’athlétisme
Merci d’avoir été présent afin d’aider à promouvoir nos différents événements notamment la Voie Royale pour lequel le JSD était un outil de communication très important pour toucher la population dionysienne. Merci d’avoir offert quelques moments de bonheurs et de fierté à nos athlètes suite à leur résultats sportifs. Bon nombre d’entre eux ont conservé quelques coupures en guise de souvenir. Merci d’avoir relayé nos différentes actions sociales, Fête de fin d’année, Sortie à la mer... Merci d’avoir suivi vie le rythme de nos activités avec passion. Merci aux journalistes, aux photographes qui ont permis de mettre en avant nos adhérents, nos bénévoles, nos athlètes de haut niveau pendant plus de 25 ans. Merci a tous.
Malik Bouraba, secrétaire du Sdus judo, habitant de Delaunay-Belleville
En qualité de secrétaire du Sdus Judo, mes relations avec le JSD n’avaient pas commencé sous les meilleurs auspices. Peu satisfait du traitement réservé aux infos du judo, j’avais pris ma plume et sur un ton ferme mais correct, je l’avais fait savoir à Aurélien Soucheyre, alors responsable des sports. M’attendant à une réponse concise pour la forme, je fus agréablement surpris. Aurélien avait pris le temps de rédiger un argumentaire solide et cerise sur le gâteau, n’avait pas oublié une pointe d’humour.
« Beaucoup de regrets »
Dès lors, je savais qu’il y avait du sérieux et de la qualité au JSD. Depuis, nos échanges furent des plus cordiaux et il m’a permis même de réaliser un vieux rêve de gosse. Plus jeune, j’aspirais à voir mon nom dans les colonnes de L’Équipe, il apparût finalement dans celles du JSD. Pour moi, sincèrement le plaisir fut le même. Merci donc à toi Aurélien et à vous tous qui nous avez tout au long de ces années fait vivre le quotidien des Dionysiens à travers votre plume.
À titre personnel, en tant que Dionysien, c’est avec beaucoup de regrets que j’ai appris la décision de la municipalité de se séparer d’un bel outil de communication qui depuis des années rendait compte de la vie dionysienne et nous présentait de beaux personnages anonymes qui d’un coup devenaient plus proches. Conscient des difficultés actuelles de la presse écrite, j’espère sincèrement que chacun d’entre vous pourra rebondir rapidement et trouver un point de chute correspondant à ses aspirations.
Philippe Sturm, président Sdus boxe anglaise
Le Journal de SaintDenis disparaît. Ma première pensée évidemment va aux salariés du journal avec qui j’ai eu d’excellentes relations concernant ma section sportive. Trente-cinq ans d’existence, une partie de l’information dionysienne disparaît avec grand regret.
Lamine Camara, coach sportif
Par quoi commencer? Le Journal de Saint-Denis, c’est toute ma vie. C’était surtout le seul journal que je lisais lorsque j’étais ado. D’abord pour les résultats sportifs de mon équipe de basket. Le JSD a tout suivi, de poussins à seniors. Le JSD était alors le seul rendez-vous journalistique des jeunes dionysiens. On pouvait, au-delà des résultats sportifs, y trouver des informations sur la ville. Lorsque j’avais quinze ans, je ne me rendais pas compte de l’indépendance de mon petit journal. C’est par la suite, lors des débats politiques de la municipalité et, plus tard lorsque je dirigeais une grande course dionysienne que je compris que les journalistes n’étaient pas des communicants. Veuillez d’ailleurs m’excuser, moi qui sommais Aurélien Soucheyre de faire une belle communication pour La Voie Royale… Merci de m’avoir éduqué à ce niveau.
« Notre Journal »
Car pour moi, le JSD n’était qu’un moyen de passer des annonces pour et par le compte de la municipalité. Heureusement que c’était plus que cela. C’est à ce moment que j’ai compris la force de cet outil, notamment pour les plus jeunes.
Le JSD reste et restera, s’il arrive à poursuivre ses orientations, l’outil neutre de la Ville. Et même si cela embête une partie de ses financeurs. J’en connais plusieurs, qui ayant quitté la ville à la retraite, prennent «des nouvelles du front» via Notre Journal. Merci à l’équipe du JSD, qui même renouvelée, a su garder son autonomie – souvent mise à l’épreuve ou discutée, à tort. Quoiqu’il arrive, je garde quelques coupures mémorables dans mon tiroir. J’ai l’impression que c’est un peu grâce à elle que j’ai appris Saint-Denis (ma pudeur me refuse d’avouer que j’aime Saint-Denis).
Henri Marcos, président de l’Office des sports
Je regrette la décision du maire Mathieu Hanotin de ne plus verser la subvention au Journal de Saint-Denis. Il aurait fallu travailler avec les journalistes pour discuter de l’évolution et des orientations du JSD. En tant qu’en ancien responsable syndicaliste national à la CGT-métallurgie, je ne peux pas accepter que des salariés perdent leur emploi. Ce journal existe depuis 35 ans. De 1971 à 1989, pendant trois mandats, j’étais conseiller municipal: j’ai été témoin en 1986 de la création du Journal de Saint-Denis. À l’époque, on disait que le Saint-Denis Républicain – l’ancêtre du JSD – était trop politique, trop marqué par le Parti communiste. Le maire Marcelin Berthelot, avec d’autres, a voulu faire un journal plus populaire, davantage ouvert aux Dionysiens de toutes sensibilités politiques.
J’ai eu des désaccords avec l’orientation du JSD, surtout ces dernières années. Mais ce n’était pas pour autant un journal aux ordres de la mairie. J’étais un fidèle lecteur du journal. Ancien basketteur, et président de l’Office des sports depuis 1993, j’ai toujours lu les articles sur le sport. Je m’informais ainsi sur tous les clubs de Saint-Denis. C’est dommage que le JSD disparaisse.
Sam Berrandou, président du Lumpini
Nous autres sportifs, dirigeants associatifs, compétiteurs ou simples pratiquants avons besoin de motivation, de reconnaissance, de communication et de transmission envers les autres. Le Journal de Saint-Denis était pour nous le principal moyen de parler des associations sportives et de les mettre en valeur à travers les résultats sportifs de leurs adhérents et dans leurs différentes actions auprès des Dionysiennes et Dionysiens. […] Ne perdons pas de vue que le sport est une activité multiple (loisirs, compétition, sport santé…) à destination de tous les publics (hommes, femmes, handicapé(e)s, jeunes, seniors) sans discrimination aucune, qu’elle soit d’ordre religieuse, d’appartenance ethnique, d’orientation sexuelle, de langue, d’opinion politique, d’origine sociale et qu’il a besoin d’être valorisé.
« Une décision regrettable »
Avec l’Office des sports de Saint-Denis, nous développons les activités physiques et sportives pour tous depuis de nombreuses années. […] La promotion et le développement des activités physiques et sportives pour tous, notamment pour les personnes en situation de handicap, sont d’intérêt général. Malheureusement une décision regrettable va mettre fin à cette remarquable publication que nous attendions chaque semaine avec curiosité et envie.
J’ai été amené à participer à la naissance du Journal de Saint-Denis en tant que Dionysien né à Saint-Denis et président depuis 1975 de l’association Avant-Garde de Saint-Denis. Sur l’injonction de monsieur Braouezec, j’ai participé au comité de surveillance formé de personnalités civiles ou politiques se réunissant tous les mois pour apprécier la sortie du numéro mensuel en présence du rédacteur. Par un diagnostic et des critiques constructives, nous apportions à la rédaction du numéro suivant, des réflexions sur la mise en page, sur les articles traités, la présentation, l’évolution des informations sur la ville, la culture, le sport, etc. La vingtaine de conseillers bénévoles travaillaient en bonne intelligence avec le rédacteur en chef sans aucune animosité politique.
Christian Jamar, La Dionysienne trampoline
Un article dans le JSD, ça faisait partie d’une petite fierté pour nous, discrète association sportive dionysienne ! Tous les ans (cette année encore), je découpais les articles parus sur nous et les joignais avec notre bilan de saison sportive. Le contenu était fidèle à notre état d’esprit et l’article était accompagné de photos expressives et originales. Merci au JSD pour cette fenêtre sur la ville...
Réactions
Bousselah (Pseudonyme non vérifié)
28 janvier 2021